Joe Cocker, la sagesse d'un vieux rocker
Télé 7 Jours (1999) - Interview
réalisée par Henry Arnaud
A l’époque de Woodstock,
il vivait à fond le mythe "Sex, drugs & rock’n’roll".
Aujourd’hui il chante Goldman, et ne jure plus que par son ranch
du Colorado.
Jean-Jacques Goldman a écrit une chanson
de votre nouvel album "No Ordinary World" (EMI). Comment
s’est passée cette collaboration ?
Je suis un mauvais compositeur puisque tous mes succès ont
été écrits par d’autres. Mais je n’ai
aucun problème d’égo et j’aime me laisser
guider. Les personnes de mon équipe ont contacté plusieurs
Européens et Jean-Jacques m’a proposé une maquette
excellente intitulée "On My Way Home". Je l’ai
enregistré à Los Angeles, sans Goldman, retenu en France.
J’aime bien les duos et garde un excellent souvenir de ma collaboration
avec Catherine Deneuve. Je voudrais l’inviter à me rejoindre
sur scène lors de mon passage en France. J’espère
qu’elle lira ‘Télé 7 jours’ et qu’elle
me répondra.
Regrettez-vous les débuts de votre carrière,
du temps de Woodstock en 1969 ?
Je regrette mes 25 ans mais pas les années de drogue et d’alcool
qui ont saccagé ma vie. J’ai la chance d’avoir
Pamela, une femme exceptionnelle et intelligente, à mon côté
et qui m’a aidé à m’extraire de la dépendance
qui me tuait. Je ne fume plus et ne bois plus. Je m’accorde
une bière de temps en temps. Je ménage ma vieille carcasse.
Qu’est-ce
qui a changé dans votre vie au fil des années ?
Depuis huit ans, je vis dans un ranch au niveau des montagnes du Colorado.
Ma vie n’a plus rien à voir avec celles des rockers de
ma jeunesse. Je suis loin de l’ambiance ‘Sexe, drugs &
rock’n’roll’ de mes débuts. J’ai des
amis paysans, éleveurs ou chasseurs. Je vais à la pêche
et me balade dans les collines avec mes chiens. Cela m’aide
à retrouver l’énergie, loin de l’agitation
des grandes villes et des salles de concert.
© Alain Canu
Votre nouvel album arrive chez les disquaires.
Comment vous sentez-vous ?
Heureux. Mais je reste prudent. Je me suis reposé cet été
dans ma propriété car les mois à venir seront
difficiles. Lors de ma dernière tournée, j’ai
passé dix-huit mois sur les routes, sans pouvoir me détendre
ni même rentrer chez moi. En octobre, je me produirai en Allemagne
et en France au cours d’une tournée de trois mois non-stop.
Je vais chanter pour la première fois en Pologne et en République
tchèque. Je suis content mais inquiet car je commence à
me faire vieux !
Cette tournée pourrait-elle être
la dernière ?
Je déteste les artistes qui annoncent leurs adieux à
la scène. Mais je commence à sentir le poids des années.
J’ai 55 ans et il m’est de plus en plus pénible
d’accumuler les tournées. J’en ai effectué
vingt mondiales, en trente ans. Plus jeune, je pensais tout arrêter
à l’âge de 40 ans.
Avez-vous remarqué
que plusieurs générations de fans assistaient à
vos concerts ?
Oui. Je ne l’aurais jamais imaginé. Lorsque j’avais
20 ans, aucun jeune n’allait à un concert avec ses parents.
Aujourd’hui, les jeunes sont aux premiers rangs et les rockers
de mon âge restent au fond de la salle. Tous chantent ensemble.
C’est drôle et touchant.